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TROISIÈME PROVINCIALE. — INTRODUCTION 199

jamais une grace actuelle et suffisante ne manque aux justes lors qu’il a dit de S. Pierre : Qu’il suivit le Seigneur qui alloit souffrir la mort: mais qu’alors il NE LE PUT suivre en souffrant la mort : qu’il avoit promis de mourir pour luy, et qu’il NE PUT mesme mourir avec luy : parce qu’il àvoit plus entrepris que ses forces ne portoient : qu’il avoit plus promis qu’ IL NE POUVOIT accomplir ? Quand il dit encore du mesme Apostre : Qu’il n’auroit pas renoncé JESUS-CHRIST si JESUS-CHRIST ne l’eust abandonné pour un temps, et qu’il n’auroit pas pleuré sa faute si JESUS-CHRIST ne l’eust regardé. NISI DESERTUS NON NEGARET : NISI RESPECTUS NON FLERET . Et quand il dit enfin : Que l’homme sans la grace de Dieu est ce que fut saint Pierre lorsqu’il renonça Jesus-Christ, et que c’est pour cette raison que le Sauveur abandonna S. Pierre pour un peu de temps, afin que tous les hommes pussent reconnoistre par son exemple qu’ils NE PEUVENT rien sans la grace de Dieu ? Quid est enim homo sine gratia Dei nisi quod fuit Petrus cum negaret Christum ? Et ideo Beatum Petrum paululùm Dominus subdeseruit ut in illo totum hominum genus posset agnoscere, nihil se sine Dei gratia prævalere. Aug. serm. 124. De temp.

A-t-il voulu dire par ces paroles et par un grand nombre d’autres semblables qui sont respandües dans ses livres, que jamais aucun juste, tel qu’estoit S. Pierre, ne manque de la grace interieure qui luy est necessaire pour pouvoir vaincre toutes sortes de tentations, lors qu’il dit au contraire, que S. Pierre en a manqué : que Dieu l’avoit abandonné en cette rencontre : qu’il ne pouvoit s’exposer à mourir pour JESUS-CHRIST : qu’il n’avoit pas de forces capables de luy faire mespriser la mort, et que tous les hommes doivent voir dans la chute du chef de l’Eglise privé du secours de la grace, qu’ils ne peuvent rien sans la grace ?

p. 225.... Ce qui est une verité si catholique et un fondement de l’humilité chrestienne gravé si profondément dans le cœur de tous les Saints, que les Peres tant de l’Eglise Latine que de la Greque ont égallement reconnu, que Dieu avoit voulu l’enseigner à son Eglise par la chùte de S. Pierre