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Page:Œuvres de Blaise Pascal, IX.djvu/277

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DE L'ESPRIT GÉOMÉTRIQUE 257

néant de durée. C'est à dire, en un mot, que quel- que mouvement, quelque nombre, quelque espace, quelque temps que ce soit, il y en a lousjours un plus grand et un moindre : de sorte qu'ils se soutien- nent tous entre le néant et l'inliny, estant tousjours infiniment esloignez de ces extrêmes.

Toutes ces veritez ne se peuvent demonstrer, et cependant ce sont les fondemens et les principes de la géométrie. Mais comme la cause qui les rend in- capables de démonstration n'est pas leur obscurité, mais au contraire leur extrême évidence, ce manque de preuve n'est pas un défaut, mais plustost une perfection. D'oii l'on voit que la géométrie ne peut définir les objets ny prouver les principes ; mais par cette seule et avantageuse raison, que les uns et les autres sont dans une extrême clarté naturelle, qui convainc la raison plus puissamment que le discours. Car qu'y a-t-il de plus évident que cette vérité, qu'un nombre, tel qu'il soit, peut estre augmenté.^ ne peut- on pas le doubler.^ Que la promptitude d'un mou- vement peut estre doublée, et qu'un espace peut estre doublé de mesme? Et qui peut aussy douter qu'un nombre, tel qu'il soit, ne puisse estre divisé parla moitié, et sa moitié encore par la moitié .^^ Car cette moitié seroit-elle un néant .^ Et comment ces deux moitiez, qui seroient deux zéros, feroient-elles un nombre .^^ De mesme, un mouvement, quelque lent qu'il soit, ne peut-il pas estre ralenti de moitié, en sorte qu'il parcoure le mesme espace dans le double du temps, et ce dernier mouvement encore ?

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