Aller au contenu

Page:Œuvres de Blaise Pascal, IX.djvu/296

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

276 ŒUVRES

l'autre d'agréer, je ne donneray ici les règles que de la première ; et encore au cas qu'on ait accordé les principes et qu'on demeure ferme à les avouer : au- trement je ne sçay s'il y auroit un art pour accommo- der les preuves à l'inconstance de nos caprices.

Mais la manière d'agréer est bien sans comparai- son plus difficile, plus subtile, plus utile et plus admirable ; aussy, si je n'en traite pas, c'est parce que je n'en suis pas capable; et je m'y sens telle- ment disproportionné, que je crois la chose absolu- ment impossible.

Ce n'est pas que je ne croye qu'il y ait des règles aussi seures pour plaire que pour demonstrer, et que qui les sçauroit parfaitement connoistre et prati- quer ne reussist aussi seurement à se faire aymer des rois et de toutes sortes de personnes, qu'à demons- trer les elemens de la géométrie à ceux qui ont assez d'imagination pour en comprendre les hypothèses. Mais j'estime, et c'est peut estre ma foiblesse qui me le fait croire, qu'il est impossible d'y arriver. Au moins je sçay que si quelqu'un en est capable, ce sont des personnes que je connois, et qu'aucun autre n'a sur cela de si claires et de si abondantes lumiè- res \ La raison de cette extrême difficulté vient de ce que les principes du plaisir ne sont pas fermes et stables. Ils sont divers en tous les hommes, et va-

��I. Havet pense que Pascal pouvait songer ici à Nicole. Il semble qu'il conviendrait plutôt de regarder du côté de ceux qui, comme Meré, se sont fait une étude de l'art de plaire dans le monde. Cf. Adam, Opuscules philosophiques de Pascal, édit. citée, p. 122, n. i.

�� �