Page:Œuvres de Blaise Pascal, IX.djvu/344

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tience. J’ay mal usé de ma santé, et vous m’en avez justement puny : ne souffrez pas que j’use mal de vostre punition. Et puisque la corruption de ma nature est telle qu’elle me rend vos faveurs pernicieuses, faites, ô mon Dieu, que vostre grace toute puissante me rende vos chastimens salutaires. Si j’ay eu le cœur plein de l’affection du monde pendant qu’il a eu quelque vigueur, aneantissez celte vigueur pour mon salut, et rendez-moy incapable de jouïr du monde[1] non seulement par la foiblesse de corps, mais encore par l’ardeur d’une charité qui me rende capable de jouïr de vous, en me rendant capable de ne jouïr que de vous.

III

O Dieu, devant qui je dois rendre un compte exact de [2]ma vie à la fin de ma vie, et à la fin du monde. O Dieu, qui ne laissez subsister le monde et toutes les choses du monde que pour exercer vos esleus, [3]et pour punir les pecheurs. Dieu, qui laissez les pecheurs endurcis dans l’usage délicieux et criminel du monde, [4]et des plaisirs du monde. Dieu, qui faites mourir nos corps, et qui à l’heure de la mort destachez nostre ame de tout ce qu’elle aimoit au monde. Dieu, qui [5]m’arrachez à ce dernier

  1. A. [soit] par foiblesse de corps, [soit par zele de charité, pour ne jouir que de vous seul].
  2. A. [toutes mes actions] à la fin…
  3. A. [ou].
  4. A. et des plaisirs du monde, manque.
  5. A. m’[arracherez].