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Page:Œuvres de Blaise Pascal, V.djvu/210

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194 ŒUVRES

ne vouloir pas prendre un moment en toute sa vie, pour mettre un chapelet à son bras, ou un rosaire dans sa poche, et assurer par là son salut avec tant de certitude, que ceux qui en font l’espreuve, n’y ont jamais esté trompez, de quelque maniere qu’ils ayent vescu, quoyque nous conseillions de ne laisser pas de bien vivre 1. Je ne vous en rapporteray que l’exemple de la p. 34. d’une femme qui prattiquant tous les jours la devotion de salüer les images de la Vierge, vescut toute sa vie en peché mortel, et mourrut enfin en cet estat ; et qui ne laissa pas d’estre sauvée par le mérite de cette devotion. Et comment cela, m’escriay-je ? C’est, dit-il, que Nostre Seigneur la fit resusciter exprés. Tant il est seur qu’on ne peut perir quand on pratique quelqu’une de ces devotions.

En verité, mon Pere, je sçay que les devotions à la Vierge sont un puissant moyen pour le salut ; et que les moindres sont d’un grand merite quand elles partent d’un mouvement de foy et de charité, comme dans les Saints qui les ont pratiquées ; mais de faire 2 accroire à ceux qui en usent sans changer leur mauvaise vie, qu’ils se convertiront à la mort, ou que Dieu les resuscitera, c’est ce que je trouve bien plus propre à entretenir les pecheurs dans leurs desordres par la fausse paix que cette confiance temeraire apporte, qu’à les en retirer par une veritable conversion que la grace seule peut produire. Qu’im-

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1. W. de quelque maniere....bien vivre, n’est pas traduit.

2. A. [à croire ].