Page:Œuvres de Blaise Pascal, V.djvu/309

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ONZIÈME PROVINCIALE. — INTRODUCTION 293

aigrissent: leur besoin et leur utilité devant estre preferée à leur goust et à leur desir [p. 324 sq.].

XXXII. Les SS. Peres n’ont point creü blesser la charité en usant de reprehensions fortes, mais veritables.

p. 86. Que si vous me demandez, Monsieur, en quoy donc la conduitte des Peres estoit excellente et sainte ? Je vous responds, en ce que leur force n’est jamais separée ny de cette charité interieure d’une part, ny de la verité de l’autre. Car leur maxime est, que la splendeur et la vehemence du discours ne doit estre employée, que pour exprimer des choses qui sont veritables, comme dit saint Augustin (de doctrin. Christ, lib. 4. c. 28.) splendentia, vehementia, sed veris rebus [p. 321]. Ces grands Saints ne permettoient jamais de dire des faussetés et des mensonges avec quelque douceur que ce pust estre. Ils appellent ces menteurs qui sont doux, devots, et mortifiez, de saints et de venerables calomniateurs, selon le terme elegant d’un Pere de l’Eglise Grecque (S. Athanase) [16e Pr., T. VI p. 288.]

XXXIII. Que les Peres nont point craint de passer pour médisans en reprenant avec force des excez publics.

...Qu’on ne nous prenne pas pour des médisans, escrit encore le grand S. Hilaire (advers. Constant.), et qu’on ne nous soupçonne pas d’estre menteurs. Car il convient à ceux qui sont ministres de la verité de n’avancer que des choses veritables. Si donc nous disons des choses fausses, que nos discours soient tenus pour infames, estant faux : mais si nous montrons, que celles que nous produisons sont publiques et manifestes, nous ne sortons point de la modestie et de la liberté apostolique en les reprochant [p. 322].

Ainsi, Monsieur, des personnes vertueuses peuvent bien se plaindre, lors que de gayeté de cœur on publie d’eux des faussetés et des impostures qui deshonorent la pureté de leur foy, et non seulement ils le peuvent, mais ils le doivent, selon les Peres : mais ceux qui ont publié ces faussetés et ces impostures n’ont aucun sujet de se plaindre, lors qu’en leur respondant on ne leur oppose que des verités proportion-