Page:Œuvres de Blaise Pascal, V.djvu/343

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ONZIÈME PROVINCIALE 327

Qu’en dites-vous, mes Peres ? Cette preference de la rougeur de Delphine à l’ardeur de ces esprits, qui n’en ont point d’autre que la charité, et la comparaison d’un évantail avec ces aisles mysterieuses, vous paroist-elle fort chrestienne dans une bouche qui consacre le Corps adorable de JESUS-CHRIST ? Je sçay qu’il ne l’a dit, que pour faire le galant et pour rire : mais c’est cela qu’on appelle rire des choses saintes. Et n’est-il pas 1 veritable, que si on luy faisoit justice, il ne se garentiroit pas d’une censure, quoyque pour s’en deffendre il se servist de cette raison, qui n’est pas elle mesme moins censurable, qu’il rapporte au livre 2 [III]. Que la Sorbonne n’a point de jurisdiction sur le Parnasse, et que les erreurs de ce païs-là ne sont sujettes ny aux Censures ny à l’Inquisition, comme s’il n’estoit deffendu d’estre blasphemateur et impie qu’en prose 3. Mais au moins on n’en garentiroit pas par là cét autre endroit de l’avant propos du mesme livre : Que l’eau de la riviere au bord de laquelle il a composé ses vers, est si propre à faire des poëtes, que quand on en feroit de l’eau beniste, elle ne chasseroit pas le demon de la poësie: non plus que celui-cy de vostre P. Garasse dans sa Somme des veritez capitales de la Religion p. 649 ⁴. où il joint le blaspheme à l’heresie, en parlant du mystere

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1. B. [vray].

2. Toutes les éditions par erreur [I].

3. Cf. Pensées, fr. 30, T. I, p. 40 : « Poète et non honneste homme. »

4. Cf. cette citation de Garasse, et celle qui suit, supra p. 302 sq.