Page:Œuvres de Blaise Pascal, VII.djvu/280

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266 ŒUVRES

corps des hommes, sans laquelle permission les Princes elles Republiques ne pourroient se servir de leur authorité pour tuer : je veux pour ces considérations traitter plus à fonds de cette matière.... Je vous demande donc, Monsieur, où est escrite cette permission que Dieu a donnée aux Souverains et aux Republiques de mettre à mort les criminels ? est-ce dans l'Escriture sainte ? l'avons nous par tradition ? est-ce un article de foy ? vous deviez nous alléguer des textes clairs et précis, qui prouvassent que par la simple raison naturelle, un Prince ou une Republique ne peut pas connoistre que pour sauver le tout, il faut abandonner une partie ; et qu'on peut couper un membre gangrené, pour sauver le reste du corps. Vous deviez nous designer le temps, auquel

Dieu a donné cette permission aux Souverains Pouvez-

vous conclure de ce que Dieu a donné des Loixà Moïse, pour punir de différents genres de mort ceux qui s'estoient laissé emporter à diverses sortes de crimes, que devant Moïse ce supplice de mort n'estoit pas permis ? Si vostre conclusion est juste ; pour la mesme raison je conclurav que Dieu ayant donné le Decalogue à Moïse, il n'y avoit point de loy natu- relle devant ce temps, qui obligeast à garder les préceptes du Decalogue. Que si vous répliquez que la conclusion est fausse, d'autant que Dieu n'a fait qu'écrire sur les tables de pierre la Loy, que la lumière de la raison découvroit aux Patriarches qui ont précédé Moïse : je vous diray que Dieu en mettant des Loix, qui ordonnoient punition de mort pour de certains crimes, n'a fait que rédiger par écrit, ce qui se prattiquoit par la seule lumière de la raison naturelle. Que si vous n'a- vez point de textes de la Saincte Escriture, si vous ne justifiez pas mieux que vous avez fait jusques à présent, que c'est par une expresse permission de Dieu, que les Souverains estent la vie aux méchants ; si c'est la seule lumière de la raison qui a conduit les grandes Monarchies, qui ont gouverné tout le monde dans la punition des mal-faiteurs : souffrez que nous nous servions de la mesme raison naturelle, pour juger si une personne particulière peut tuer celuy qui l'attaque non

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