Page:Œuvres de Blaise Pascal, XI.djvu/286

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en retranchant la racine des hérésies avant leur naissance, sans s’exposer à cette raillerie, qu’elle combatte des chimères.

Ne suffit-il pas qu’une erreur soit véritable, pour estre un digne objet de son zèle ; et pourquoy faut-il qu’elle soit obligée d’attendre à la condamner qu’elle se soit glissée dans le cœur de ses enfans ?

Bannira-t-on de sa conduite, toute sage et toute prudente, la prévoyance qui est une partie si essentielle et la plus utile de la prudence ? Et par quel estrange renversement cette vigilance si salutaire qui est louable aux particuliers, aux familles, aux Etats et à toutes sortes de gouvernemens, quoy qu’ils soient sujets à périr, deviendra-t-clle ridicule à l’Eglise dont les soins doivent estre tout autrement étendus, par l’asseurance qu’elle a de son éternelle durée ?

Mais ce que je combats est véritablement une chimère ; et il n’y a rien de plus vain que ce raisonnement. L’Eglise regarde les enfans qui luy sont promis dans tous les siècles, comme s’ils estoient presens ; et les unissant tous dans son sein, elle recherche dans l’imitation de ceux qui sont passez, les règles de la conduite de ceux qui sont à venir, et leur prépare les moyens de leur salut avec autant d’amour qu’à ceux qu’elle nourrit présentement, par une prévoyance qui n’a non plus de bornes que la charité qu’elle leur porte.

Aussi elle n’a pas seulement un soin particulier de s’opposer aux erreurs présentes, ny de prévenir