Page:Œuvres de Blaise Pascal, XII.djvu/247

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vraisemblable, et qu’on n’en puisse découvrir la fausseté, sur tout si les conséquences en sont dangereuses : et quand il s’en trouverait qui prendraient plaisir à mentir pour mentir, ils ne songent qu’à en jouir dans le moment, et non pas à rien établir de solide sur leur mensonge. Ainsi il est sans doute que les apôtres n’ont pu avoir dessein d’imposer dans ce qu’ils ont dit de la résurrection de Jésus-Christ. Quels gens ctaient ce pour se faire croire ? et quelle autorité leur donnait pour cela leur rang entre les Juifs, ou leur mérite ? N’avaient-ils rien à inventer de plus fin qu’un mensonge si grossier, dont il était si aisé de les convaincre, et dont ils n’eussent donné pour toutes preuves que le rapport de ses disciples ? Et comment pourrait-on se figurer qu’ils eussent été assez hardis pour aller attaquer, sur un semblable fondement, tout ce qu’il y avait de grand parmi les Juifs, et de puissant sur la terre, et entreprendre de changer une religion aussi ancienne que le monde, et appuyée sur une infinité de miracles aussi publics que celui-là aurait été particulier pour eux ? Il ne suffisait pas qu’ils fussent fourbes, pour former un si étrange dessein ; il fallait encore qu’ils eussent perdu le sens ; et en ce cas l’imposture n’eût guère duré. Et quand ç’ auraient été, les plus habiles gens du monde, comme ils l’ont paru depuis, ils n’en auraient que mieux vu ce qu’il y avait à craindre, combien il était difficile, légers et changeants comme sont les hommes, que quelqu’un d’eux ne se Laissât gagner aux. promesses, ou aux menaces ; et enfin qu’il était de la dernière, extravagance de s’exposer de gaîté de cœur aux tourments, et à la mort qui leur était assurée, soit que l’imposture fût découverte, ou qu’elle réussît.

Je n’entreprendrai pas d’entrer plus avant dans ce qu’on peut dire pour la vérité de l’histoire évangélique, sur laquelle M. Pascal nous a laissé de si belles remarques, mais qui ne sont presque rien au prix de ce qu’il eût fait, s’il eût vécu. Il ; avait tant de pénétration pour ces choses-là, et c’est une source si inépuisable, qu’il n’aurait jamais cessé d’y faire de nouvelles découvertes. Que n’eût-il point dit du style des évangélistes et de leurs personnes, des apôtres en particulier et de leurs écrits, des voies par où cette religion s’est établie, et de l’état où elle est, de cette étrange quantité de miracles, de martyrs et de saints, et enfin de tant de choses qui