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LE COMITÉ D’EXAMEN

Roannez à un Comité qui comprenait, outre Arnauld et Nicole, M. Filleau de la Chaise, M. du Bois et M. de Tréville.

À quel titre ces trois noms se trouvent-ils réunis ? Un passage d’une lettre que Nicole écrit plus de dix ans après à Mme de Saint-Loup se trouve être significatif à cet égard : « Il est bon, Madame, d’accoutumer le corps aux viandes communes, et qu’on trouve partout, pour n’être pas misérable quand on n’a pas ce qu’on se serait rendu nécessaire : il est bon d’accoutumer son esprit aux esprits communs et de pouvoir se passer de M. de Tréville, de M. du Bois et de M. de la Chaise, et enfin de se défaire de l’idée de la nécessité de toutes ces choses[1]. » On le voit, Arnauld et Nicole ont fait appel pour publier l’ouvrage d’un « bel esprit » tel que Pascal à ceux qui parmi les amis de Port-Royal avaient la réputation de beaux esprits. De Tréville n’avait pas encore trente ans, c’était un des plus brillants gentilshommes de la cour ; assidu dans la société de Mme de Longueville, il est à la veille de la conversion totale qu’amena la mort subite d’Henriette d’Angleterre et dont l’éclat devait retentir jusque dans un sermon de Bourdaloue (13 décembre 1671). Il est du parti de Port-Royal « dont le genre de piété, écrit Saint-Simon à son propos, était celui des gens instruits, d’esprit et de bon goût » ; il y occupe cette position originale et unique que dit Saint-Beuve : « il était grand homme pour tous ses amis, il était pour eux le fameux M. de Tréville[2]. » N’est-ce pas de Nicole même

  1. La lettre est de décembre 1679 ; elle est citée par Sainte-Beuve, Port-Royal, 5e édit., t. IV, p. 481.
  2. Sainte-Beuve, Port-Royal, 5e édit., t. V, p. 56. Cf. La Bruyère : Portrait d’Arsène, « occupé et rempli de ses sublimes idées, il se donne