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Page:Œuvres de Blaise Pascal, XII.djvu/283

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suivant qu’elles sont interprétées par l’esprit de concupiscence ou par l’esprit de charité, C’est ce que devait mettre en évidence, si nous ne nous trompons, ce chapitre des Fondements au quel Pascal fait allusion, et dont Havel déclarait ne retrouver aucune trace. Dieu n’a pas voulu la lumière totale ; car les hommes ayant péché n’en sont pas dignes et ils ne peuvent être sauvés par les voies naturelles ; Dieu n’a pas voulu l’obscurité totale, car, étant bon, il leur a envoyé un libérateur. Mais il a fait qu’il y eût assez de lumière pour éclairer les élus ; assez d’obscurité pour aveugler les réprouvés. Ce mélange est essentiel à la doctrine catholique : les faits historiques, pour devenir « les Fondements » du catholicisme, doivent porter en eux le caractère de ce mélange ; il faut qu’ils soient assez obscurs pour justifier toutes les objections des hérétiques ou des athées : mais cette obscurité, loin d’ébranler celui qui a la foi, le confirme : car celui-là non seulement y voit assez de clarté pour surmonter cette obscurité, mais en core il comprend la nécessité de cette obscurité. Ce n’est donc pas à la raison qu’il appartiendra de faire le départ entre la clarté et l’obscurité ; elle demeure en équilibre entre l’une et l’autre ; si nous opposons l’obscurité à la clarté, c’est par l’inclination de la concupiscence, comme l’inclination de la grâce nous permet de concilier l’obscurité et la clarté dans une synthèse où l’une et l’autre sont justifiées. L’histoire du christianisme est faite à la fois pour convertir et condamner ; plus elle apparaîtra plus ambiguë, elle sera claire pour ceux auxquels Dieu a donné la disposition du cœur nécessaire pour entendre cette ambiguïté ; et aux réprouvés eux-mêmes, lorsqu’au jour de la damnation ils saisiront enfin le sens de cette obscurité qui les rebutait, leur propre raison reprochera leur obstination, et ce sera pour eux un supplice de plus.


Section IX. La Perpétuité.


Tout d’abord si le fait par excellence c’est d’être le pi us grand fait historique qu’on puisse invoquer en faveur de la religion, c’est sa perpétuité : par le judaïsme qui n’en est que le fondement, le christianisme remonte aux origines mêmes de l’humanité. Voilà ce qui est clair. Mais il faut, d’après le prin-