Page:Œuvres de C. Tillier - I.djvu/115

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Tout en devisant ainsi, ils approchaient du village de Moulot ; ils aperçurent, sur le seuil d’une porte de vigne, une espèce de soldat encadré profondément entre des ronces, dont les touffes brunes et rouges meurtries par la gelée, tombaient pêle-mêle comme une chevelure en désordre. Cet homme avait sur sa tête un morceau de chapeau à cornes, sans cocarde ; sa figure en ruine avait une teinte pierreuse, cette teinte dorée qu’ont les vieux monuments au soleil. Deux grandes moustaches blanches encadraient sa bouche comme deux parenthèses, il était couvert d’un vieil uniforme. Sur une des manches s’étendait transversalement un vieux galon effacé.

L’autre manche, dépouillée de son insigne, n’offrait plus qu’un rectangle qui se distinguait du reste de l’étoffe par une laine plus neuve et d’une nuance plus foncée. Ses jambes nues, enflées par le froid, étaient rouges comme des betteraves. Il laissait tomber d’une gourde quelques gouttes d’eau-de-vie sur de vieux morceaux de pain noir ; un caniche de la grande espèce, était assis devant lui