même ; cela ne me fait pas rire, moi ; voilà toujours le résultat des mauvaises farces de Benjamin ; M. Durand nous fera payer son âne si nous ne le lui rendons pas tel qu’il nous l’a confié.
— En tout cas, dit mon oncle, il ne peut toujours nous en faire payer que la queue. L’homme qui m’aurait coupé la queue, à moi, – et ma queue vaut bien assurément, sans la flatter, celle de l’âne de M. Durand, – serait-il donc aussi coupable devant la justice que s’il m’eût tué tout entier ?
— Assurément non, dit M. Minxit, et s’il faut t’en dire mon avis, je ne t’en estimerais pas une obole de moins.
Cependant, la cour s’emplissait de femmes qui se tenaient dans une posture respectueuse, comme on se tient autour d’une chapelle trop étroite tandis qu’on y célèbre l’office, et dont un grand nombre étaient à genoux.
— Il faut que vous nous débarrassiez de ce monde, dit M. Minxit à Benjamin.
— Rien de plus facile, répondit celui-ci ; il se mit alors à la fenêtre et dit à ces bonnes gens qu’ils auraient tout le temps de voir la sainte Vierge, qu’elle se proposait de rester deux jours chez M. Minxit, et que le lendemain dimanche elle ne manquerait pas d’assister à la grand’messe. Sur cette assurance, le peuple se retira satisfait.
— Voilà, dit le curé, des paroissiens qui ne me font pas beaucoup d’honneur, il faut que dimanche je leur en dise quelque chose dans mon prône. Comment peut-on être si borné de prendre pour une chose sainte la queue crottée d’un bourriquet ?
— Mais, pasteur, répondit Benjamin, vous qui êtes à table si philosophe, n’avez-vous pas dans votre église deux ou trois os blancs comme du papier, qui sont sous verre et que vous appelez les reliques de saint Maurice ?