Page:Œuvres de C. Tillier - I.djvu/69

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tirade à Agnès jusqu’à la passion la plus haute, jusqu’à toucher le drame, retombe, juste à la fin, au vrai ton de la comédie par ce vers si plaisant :

« Veux-tu que je m’arrache un côté de cheveux ? »

De même, dans ses pamphlets, Tillier, au moment où l’exaltation l’emporte jusqu’au lyrisme, où le pamphlétaire s’élève et se perd parfois dans le poète, rencontre vite un mot comique, un tour piquant, une sorte de lest qui vite ramène l’œuvre à sa hauteur naturelle, à son vrai diapazon. Voyez ! dans un de ses meilleurs pamphlets, après un élan sublime qui sent l’épopée, sur les services et les martyres de la Pologne, il finit ainsi :

« Vous ne pouviez, dites-vous, secourir la Pologne : la Prusse vous barrait le passage ; mais qu’est-ce que la Prusse pour la France qui marche en armes ? une poutre, une paille ! J’aurais roulé mes canons jusqu’à sa frontière, et j’aurais dit à la Prusse : Ces hommes qu’on assassine là-bas sont nos frères ; laisse-nous aller à leur secours, ou nous allons te trouer de part en part de nos boulets !… Et si elle eût dit non, je l’aurais enfoncée comme un vitrage. »

Le vitrage vaut le côté de cheveux.

Ennemi de l’art pour l’art, écrivant pour prouver, il n’est pas de ces sonneurs de mots qui font de la musique, comme il le dit si bien, au lieu de faire