Page:Œuvres de Catulle, Tibulle et Properce, trad de Guerle, Valatour et Guenouille, 1860.djvu/163

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du bonheur, du fruit de mes prières. Je me promettais des jours pleins de charmes, si tu recouvrais la santé. Insensé ! l'Amour a trompé mon attente. Je cultiverai mes champs, me disais-je ; Délie sera là pour garder mes récoltes, tandis que l'on battra les gerbes sur l'aire à l'ardeur du soleil ; ou bien elle veillera sur mes cuves remplies de raisins ; sur la liqueur douce et limpide coulant de la grappe pressée d'un pied agile. Elle s'accoutumera à compter mon troupeau ; à écouter le babil du jeune esclave, qui, enhardi par les caresses d'une maîtresse qui l'aime, se jouera sur son sein. Elle saura offrir au dieu des laboureurs un raisin pour prix de ses vendanges, quelques épis pour prix de ses moissons, une brebis en reconnaissance des soins qu'il aura pris du troupeau. Que tous obéissent à ses ordres, que ses soins s'étendent sur tout ; je me plairai à n'être compté pour rien dans la maison. Dans ma retraite je recevrai mon cher Messala ; Délie cueillera pour lui sur des arbres de choix les fruits les plus savoureux ; dans son respect pour un si grand personnage, elle lui prodiguera les soins les plus attentifs, elle lui présentera elle-même les mets préparés par ses mains. Vaines illusions, qu'aujourd'hui les vents dissipent à travers l'Arménie embaumée ! Plus d'une fois j'ai essayé de noyer mes chagrins dans le vin ; mais toujours la douleur changeait mon vin en larmes. Plus d'une fois, je serrai une autre beauté entre