Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/366

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voulu : si donc quelque chose est par soi et non par une cause, il est vrai de dire qu’elle est infinie et non limitée.

Pour moi, je n’acquiesce pas tout-à-fait à ce raisonnement ; car, qu’une chose soit par soi tant qu’il vous plaira, c’est-à-dire qu’elle ne soit point par autrui, que pourrez-vous dire si cette limitation vient de ses principes internes et constituants, c’est-à-dire de sa forme même et de son essence, laquelle néanmoins vous n’avez pas encore prouvé être infinie ? Certainement, si vous supposez que le chaud est chaud, il sera chaud par ses principes internes et constituants, et non pas froid, encore que vous imaginiez qu’il ne soit pas par autrui ce qu’il est. Je ne doute point que M. Descartes ne manque pas de raisons pour substituer à ce que les autres n’ont peut-être pas assez suffisamment expliqué ni déduit assez clairement.

Enfin, je conviens avec ce grand homme en ce qu’il établit pour règle générale « que les choses que nous concevons fort clairement et fort distinctement sont toutes vraies. » Même je crois que tout ce que je pense est vrai : et il y a déjà longtemps que j’ai renoncé à toutes les chimères et à tous les êtres de raison, car aucune puissance ne se peut détourner de son propre objet ; si la volonté se meut, elle tend au bien ; les sens mêmes ne se trompent point : car la vue voit ce qu’elle voit,