Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/444

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qui les avertit intérieurement, ou que, péchant en d’autres choses, ils se rendent indignes de cette grâce. Et je dirai hardiment qu’un infidèle, qui, destitué de toute grâce surnaturelle et ignorant tout-à-fait que les choses que nous autres chrétiens croyons ont été révélées de Dieu, néanmoins, attiré par quelques faux raisonnements, se porteroit à croire ces mêmes choses qui lui seroient obscures, ne seroit pas pour cela fidèle, mais plutôt qu’il pécheroit en ce qu’il ne se serviroit pas comme il faut de sa raison.

Et je ne pense pas que jamais aucun théologien orthodoxe ait eu d’autres sentiments touchant cela ; et ceux aussi qui liront mes Méditations n’auront pas sujet de croire que je n’aie point connu cette lumière surnaturelle, puisque, dans la quatrième, où j’ai soigneusement recherché la cause de l’erreur ou fausseté, j’ai dit, en paroles expresses, « qu’elle dispose l’intérieur de notre pensée à vouloir, et que néanmoins elle ne diminue point la liberté. »

Au reste, je vous prie ici de vous souvenir que, touchant les choses que la volonté peut embrasser, j’ai toujours mis une très grande distinction entre l’usage de la vie et la contemplation de la vérité. Car, pour ce qui regarde l’usage de la vie, tant s’en faut que je pense qu’il ne faille suivre que les choses que nous connoissons très clairement, qu’au contraire je tiens qu’il ne faut pas même toujours