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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

particulière vertu et faculté de penser, ce qui fait que par une abstraction de l’esprit elle peut être conçue avec cette seule vertu comme une chose qui pense, quoique en effet les propriétés et qualités du corps conviennent à toutes les choses qui ont la faculté de penser ; tout ainsi que la quantité peut être conçue avec la longueur seule, quoique en effet il n’y ait point de quantité à laquelle, avec la longueur, la largeur et la profondeur ne conviennent. Ce qui augmente cette difficulté est que cette vertu de penser semble être attachée aux organes corporels, puisque dans les enfants elle paroît assoupie, et dans les fous tout-à-fait éteinte et perdue, ce que ces personnes impies et meurtrières des âmes nous objectent principalement.

Voilà ce que j’avois à dire touchant la distinction réelle de l’esprit d’avec le corps ; mais puisque M. Descartes a entrepris de démontrer l’immortalité de l’âme, on peut demander avec raison si elle suit évidemment de cette distinction. Car, selon les principes de la philosophie ordinaire, cela ne s’ensuit point du tout ; vu qu’ordinairement ils disent que les âmes des bêtes sont distinctes de leurs corps, et que néanmoins elles périssent avec eux.

J’avois étendu jusques ici cet écrit, et mon dessein étoit de montrer comment, selon les principes de notre auteur, lesquels je pensois avoir recueillis