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Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome II.djvu/343

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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

nos âmes procéderoient des leurs. Pour ce qui est des chiens et des singes, quand je leur attribuerois la pensée, il ne s’ensuivroit pas de là que l’âme humaine n’est point distincte du corps, mais plutôt que dans les autres animaux les esprits et les corps sont aussi distingués ; ce que les mêmes platoniciens, dont on nous vantoit tout maintenant l’autorité, ont estimé avec Pythagore, comme leur métempsycose fait assez connoître. Mais pour moi je n’ai pas seulement dit que dans les bêtes il n’y avoit point de pensée, ainsi qu’on me veut faire accroire, mais qui plus est je l’ai prouvé par des raisons qui sont si fortes, que jusques à présent je n’ai vu personne qui ait rien opposé de considérable à l’encontre. Et ce sont plutôt ceux qui assurent que « les chiens savent en veillant qu’ils courent, et même en dormant qu’ils aboient, » et qui en parlent comme s’ils étoient d’intelligence avec eux et qu’ils vissent tout ce qui se passe dans leurs cœurs, lesquels ne prouvent rien de ce qu’ils disent. Car bien qu’ils ajoutent « qu’ils ne peuvent pas se persuader que les opérations des bêtes puissent être suffisamment expliquées par le moyen de la mécanique, sans leur attribuer ni sens, ni âme, ni vie » (c’est-à-dire, selon que je l’explique, sans la pensée ; car je ne leur ai jamais dénié ce que vulgairement on appelle vie, âme corporelle et sens organique), « qu’au contraire ils

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