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Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome II.djvu/344

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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

veulent soutenir, au dédit de ce que l’on voudra, que c’est une chose tout-à-fait impossible et même ridicule, ». cela néanmoins ne doit pas passer pour une preuve : car il n’y a point de proposition si véritable dont on ne puisse dire en même façon qu’on ne se la sauroit persuader, et même ce n’est point la coutume d’en venir aux gageures que lorsque les preuves nous manquent. Et, puisqu’on a vu autrefois de grands hommes qui se sont moqués, d’une façon presque pareille, de ceux qui soutenoient qu’il y avoit des antipodes, j’estime qu’il ne faut pas légèrement tenir pour faux tout ce qui semble ridicule à quelques autres.

Enfin, ce qu’on ajoute ensuite, « [1] qu’il s’en trouvera plusieurs qui diront que toutes les actions de l’homme sont semblables à celles des machines, et qui ne voudront plus admettre en lui de sens ni d’entendement, s’il est vrai que les singes, les chiens et les éléphants agissent aussi comme des machines en toutes leurs opérations, » n’est pas aussi une raison qui prouve rien, si ce n’est peut- être qu’il y a des hommes qui conçoivent les choses si confusément, et qui s’attachent avec tant d’opiniâtreté aux premières opinions qu’ils ont une fois conçues, sans les avoir jamais bien examinées, que plutôt que de s’en départir ils nieront qu’ils aient en eux-mêmes les choses qu’ils expérimentent

  1. Voyez sixièmes objections, page 321 de ce volume.