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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

Néanmoins je ne l’ai pu refuser aux sollicitations de mon ami, ayant pensé que vous prendrez en bonne part un dessein qui vient plutôt de lui que de moi, et sachant d’ailleurs que vous êtes si humain que vous croirez facilement que je n’ai point eu d’autre pensée que celle de vous proposer nûment mes doutes et mes difficultés. Et certes ce sera bien assez si vous prenez la patience de les lire d’un bout à l’autre. Car de penser qu’elles vous doivent émouvoir et vous donner la moindre défiance de vos raisonnements, ou vous obliger à perdre le temps à leur répondre que vous devez mieux employer, j’en suis fort éloigné et ne vous le conseillerois pas. Je n’oserois pas même vous les proposer sans rougir, étant assuré qu’il n’y en a pas une qui ne vous ait plusieurs fois passé par l’esprit et que vous n’ayez ou expressément méprisée ou jugée devoir être dissimulée. Je les propose donc, mais sans autre dessein que celui d’une simple proposition, laquelle je fais non contre les choses que vous traitez et dont vous avez entrepris la démonstration, mais seulement contre la méthode et les raisons dont vous usez pour les démontrer. Car, de vrai, je fais profession de croire qu’il y a un Dieu et que nos âmes sont immortelles : et je n’ai de la difficulté qu’à comprendre la force et l’énergie du raisonnement que vous employez pour la preuve de ces vérités métaphysiques, et