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Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome II.djvu/98

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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

ses qui s’offroient autrefois à vous de prime abord ; par exemple, que « vous avez un visage, des mains, et tous ces autres membres que vous appeliez du nom de corps ; comme aussi que vous êtes nourri, que vous marchez, que vous sentez et que vous pensez, ce que vous rapportiez à l’âme. » Je vous accorde tout cela, pourvu que nous nous gardions de la distinction que vous mettez entre l’esprit et le corps. Vous dites que « vous ne vous arrêtiez point alors à penser ce que c’étoit que l’âme, ou bien, si vous vous y arrêtiez, que vous imaginiez qu’elle étoit quelque chose de fort subtil, semblable au vent, au feu ou à l’air, infus et répandu dans les parties les plus grossières de votre corps. » Cela certes est digne de remarque, « mais que pour le corps vous ne doutiez nullement que ce ne fût une chose dont la nature consistoit à pouvoir être figurée, comprise en quelque lieu, remplir un espace et en exclure tout autre corps ; à pouvoir être aperçue par l’attouchement, par la vue, par l’ouïe, par l’odorat et par le goût, et être mue en plusieurs façons. » Vous pouvez encore aujourd’hui attribuer aux corps les mêmes choses, pourvu que vous ne les attribuiez pas toutes à chacun d’eux : car le vent est un corps, et néanmoins il ne s’aperçoit point par la vue, et que vous n’en excluiez pas les autres choses que vous rapportiez à l’âme : car le vent, le feu, et plusieurs autres corps, se