Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome XI.djvu/292

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

En effet, ou ils expliquent autre chose, ou ils n’expliquent rien du tout ; car qui ne connoît pas parfaitement le changement quelconque qui s’opère quand nous changeons de lieu, et quel homme concevra l’idée de ce même changement quand on lui dira, Le lieu est la superficie du corps ambiant, puisque cette superficie peut changer moi restant immobile et ne changeant pas de place, et d’autre part se mouvoir avec moi de telle sorte que, encore bien que ce soit toujours la même qui m’entoure, je ne me trouve plus dans le même lieu ? Mais n’est-ce pas paroître proférer des paroles magiques, qui ont une vertu cachée et passent la portée de l’esprit hu­main, que de dire que le mouvement (la chose la mieux connue de chacun) est l’acte d’une puis­sance, en tant que puissance ? Qui comprend ces paroles, et qui ignore ce que c’est que le mouve­ment ? Qui n’avoueroit que c’est là chercher un nœud dans un brin de jonc ? On doit donc reconnoître qu’il ne faut jamais expliquer les choses de cette espèce par des définitions, de peur de prendre le simple pour le composé, mais seule­ment les distinguer les unes des autres, et les exa­miner attentivement selon les lumières de son esprit.

Il suit, en troisième lieu, que toute la science humaine consiste seulement à voir distinctement comment ces natures simples concourent entre