Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome XI.djvu/366

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Polyandre. Voilà certes de grandes promesses, et elles valent bien la peine, pourvu que vous les accomplissiez, que nous vous accordions ce que vous demandez. Tenez donc vos promesses, nous vous tiendrons les nôtres.

Eudoxe. Puis donc que vous ne pouvez nier que vous doutiez, et qu’au contraire il est certain que vous doutez, et si certain que vous ne pouvez douter de cela même, il est vrai aussi que vous êtes, vous qui doutez ; et cela est si vrai que vous n’en pouvez pas douter davantage.

Polyandre. Je suis de votre avis ; car, si je n’étois pas, je ne pourrais douter.

Eudoxe. Vous êtes donc, et vous savez que vous êtes, et vous le savez, parce que vous doutez.

Polyandre. Tout cela est très vrai.

Eudoxe. Mais, pour que vous ne soyez pas détourné de votre dessein, avançons peu à peu, et, comme je vous l’ai dit, vous vous sentirez entraîné plus loin que vous ne croyez. Vous êtes, et vous savez que vous êtes, et vous savez cela parce que vous savez que vous doutez. Mais, vous qui doutez de tout et qui ne pouvez pas douter de vous-même, qui êtes-vous ?

Polyandre. La réponse n’est pas difficile, et je vois bien que vous m’avez choisi au lieu d’Épistémon, pour que je pusse satisfaire à vos questions. Vous n’avez pas dessein d’en faire aucune