Page:Œuvres de François Villon Thuasne 1923.djvu/83

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il avait été condamné n’avait pas la gravité que lui avait prêtée le prévôt. Dans sa joie, Villon adressa au clerc du guichet du Châtelet, Étienne Garnier, une ballade pleine de malice et de gaîté :

Que vous semble de mon appel,
Garnier ? Feis je sens ou folie ?

En même temps, il transmettait à la Cour de Parlement ses remerciements les plus vifs qu’il faisait suivre d’une dernière requête. Il sollicitait la faveur d’un sursis de trois jours pour aller embrasser les siens, et leur demander le viatique indispensable pour se mettre en route.

Ici s’arrête ce que nous savons de François Villon. Il existe bien deux anecdotes rapportées par Rabelais, dont l’une, invraisemblable, se contredit d’elle-même[1] ; l’autre qui, par la précision des détails et l’exactitude de certains côtés du récit, décèle son origine traditionnelle et mérite davantage qu’on s’y arrête. Rabelais, par la voix du seigneur de Basché, rapporte que Villon « sur ses vieux jours »

  1. Pantagruel, IV, 67 ; 13. — Par cette erreur intentionnelle, qui est loin d’être unique dans l’œuvre de Rabelais, qui nous dit qu’il ne veut pas montrer son scepticisme à l’endroit de l’Histoire et de la prétendue vérité historique ? (Cf. mon volume Villon et Rabelais, p. 151-152.) Quand Rabelais accumule comme à plaisir les confusions sur la mort de Brutus qu’il fait mourir à la bataille de Pharsale (III, 10), et qu’il confond cette dernière avec celle de Philippes (tous événements qu’il connaissait mieux que personne), c’est de propos délibéré qu’il agit ; et les éditeurs auraient bien dû dire, à sa décharge, qu’à l’exemple des anciens poètes latins, il parlait des batailles de Pharsale et de Philippes comme si elles s’étaient livrées dans les mêmes lieux. L’erreur — erreur voulue — serait attribuable à Virgile qui, de même que ses imitateurs, a voulu faire cette confusion volontaire et poétique. Cf. Bulletin de l’Académie des Inscr. et Belles-Lettres dans la Revue critique (15 avril 1914), p. 140 ; et aussi, sur le même sujet, une critique de l’édition d’Horace donnée par Jean Masson (Leyde, 1708, in-12), dans la Bibliothèque choisie, t. XIV (Amsterdam, 1707, in-12), p. 240-241.