L’amour !… Et je suis seul, déjà seul, quand j’entends
Frémir encor l’airain qui m’a sonné vingt ans !
La fatigue m’endort et besoin m’éveille
Sans qu’un souhait ami caresse mon oreille.
Quand j’allais au printemps chercher dans vos jardins
Un sentier vierge encor du pied des citadins,
Sur mon cœur solitaire et qu’un vague amour tue,
J’ai pressé bien souvent un socle de statue ;
Et, miracle du ciel ! bien souvent j’ai cru voir
La froide Galatée en mes bras s’émouvoir,
Voir des pleurs de pitié pendus à sa paupière,
Voir des souris éclos de ses lèvres de pierre ;
Et quand ma plainte au marbre inspirait tant d’émoi,
Les cœurs vivants restaient pétrifiés pour moi !
Oh ! voilà le tourment auquel rien n’habitue,
Qui dévore les nuits et les jours, et qui tue.
Ce supplice inouï, quand je vous le nommais,
Vous ne compreniez pas : ne comprenez jamais,
Madame !… Au grand désert de votre capitale,
L’homme seul, voyez-vous, c’est l’antique Tantale ;
C’est le serpent coupé, vivace et bondissant,
Dont chaque tronçon veuf poursuit son frère absent ;
C’est l’homme enseveli tout vivant dans la tombe
Qui se réveille au bruit de la terre qui tombe ;
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