’œuvre avec ardeur ; mais, ô surprise ! la lime s’édentait aux barreaux sans y mordre, et la pierre dans laquelle ils étaient scellés, inébranlable, ne répondait aux coups de marteau que par un bruit sourd et moqueur.
« Sire, dit un vieux moine en hochant la tête, tous les efforts humains seraient impuissants à exécuter vos ordres ; car, ajouta-t-il en montrant la cage, ceci n’est pas œuvre humaine. J’ai ouï dire qu’un Bohémien, sorcier comme ils le sont tous, bâtit cette cage autrefois, afin de se racheter de la potence. Il faudrait, pour la renverser aujourd’hui, la baguette d’une fée (mais il n’existe plus guère de fées que je sache), ou bien encore la main infernale qui l’a construite ; mais depuis longtemps le Bohémien a disparu.
Qu’on cherche cet homme et qu’on l’amène, dit le roi. A qui le découvrira honneurs et largesses ! un diamant de ma couronne s’il est noble ; son pesant d’or si c’est un vilain ! » Et d’un geste il congédia son brillant cortège. Les deux amis, demeurés seuls, sauf quelques pages qui veillaient sur eux à distance, se regardèrent silencieux. Une inquiétude terrible, et qu’ils n’osaient se communiquer, faisait battre leurs cœurs à l’unisson. « Si l’ouvirer magique était mort, pensaient-ils, si la cage enchantée ne s’ouvrait plus ! » Et ils pleuraient ; et chose étrange ! Blanchette, pour la première fois, semblait ne pas s’émouvoir de leurs larmes. C’est qu’une préoccupation bien vive et bien naturelle l’agitait alors. Vous vous rappelez, ma sœur, que la métamorphose expiatoire devait durer cent ans. Or il y avait, au moment dont nous parlons, 99 ans 364 jours 23 heures et 59 minutes qu’Angélina était devenue Blanchette. L’horloge de Plessis-lès-Tours s’ébranla