Le proconsul jaloux veut te livrer aux bêtes ;
As-tu blessé l’orgueil d’un bel esprit mutin ?
Pour sauver ton repos, fuis, ou, quelque matin,
Pâle encor d’une veille, il faudra que tu coures
Brûler au nez d’un fat tes vers changés en bourres…
Hélas ! c’est mon histoire… Eh bien ! à vous aussi,
Zoïles spadassins, je répondrai : merci !
Vous avez retrempé mon cœur dans l’amertume ;
Le fiel dont il est plein déborde sous ma plume.
Pourtant, dormez en paix : de mon brûlant courroux
Je n’égarerai point un seul éclair sur vous ;
Je ne vous rendrai pas outrage pour outrage,
Car vos bourdonnements ne sont pas un orage.
Vous ne méritez pas que l’on vous crache un vers,
Et d’un large mépris je vous ai tous couverts.
Pour la prostituer, j’estime trop ma haine ;
L’ouragan, dont le vol courbe l’orgueil du chêne,
Dédaigne d’effleurer l’insolent végétal,
Qui se carre au soleil sur le fumier natal.
Pour cible hebdomadaire, à mes coups polémiques,
Je veux des fats titrés, des sots académiques,
Je veux des ennemis que je puisse, en chemin,
Écarter d’un soufflet sans me salir la main.
Venez, gens du pouvoir, dans son nouveau refuge,
Page:Œuvres de Hégésippe Moreau (Garnier, 1864).djvu/88
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