Page:Œuvres de M. de Crébillon, tome premier, 1750.djvu/136

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Si ſa flotte une fois abandonne l’Eubée,
Par quel autre moyen me ſera-t-il permis
De ſortir déſormais de ces lieux ennemis ?

T H É O D A M I E.

Ne précipitez rien : quel intérêt vous preſſe ?
Pourquoi, ſeigneur, pourquoi vous expoſer ſans ceſſe ?
À peine enfin ſauvé de la fureur des eaux,
Ne vous rejetez point dans des périls nouveaux.
À partir de Chalcys le tyran ſe prépare ;
Les vents vont de cette île éloigner ce barbare :
D’un ſecours dangereux ſans tenter le haſard,
Cachez-vous avec ſoin juſques à ſon départ.

T H Y E S T E.

Ma fille, quel conſeil ! Eh quoi ! Vous pouvez croire
Que je veuille à mes jours ſacrifier ma gloire !
Non, non, je ne puis voir déſoler ſans ſecours
Des états ſi longtemps l’aſile de mes jours.
Moi, qui ne prétendais m’emparer de Mycènes
Que pour forcer Atrée à s’éloigner d’Athènes,
Je l’abandonnerais lorſque elle va périr !
Non, je cours dans ſes murs la défendre, ou mourir.
Vous m’oppoſez en vain l’impitoyable Atrée :
Peut-il me ſoupçonner d’être en cette contrée ?
Sans appui, ſans ſecours, ſans ſuite dans ces lieux,
Sans éclat qui ſur moi puiſſe attirer les yeux,