Page:Œuvres de M. de Crébillon, tome premier, 1750.djvu/194

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T H Y E S T E.

Mon fils eſt mort, cruel, dans ce même palais,
Et dans le même inſtant où l’on m’offre la paix !
Et, pour comble d’horreurs, pour comble d’épouvante,
Barbare, c’eſt du ſang que ta main me préſente !
Ô terre, en ce moment, peux-tu nous ſoutenir ?
Ô de mon ſonge affreux triſte reſſouvenir ?
Mon fils, eſt-ce ton ſang qu’on offrait à ton père ?

A T R É E.

Méconnais-tu ce ſang ?

T H Y E S T E.

Méconnais-tu ce ſang ?Je reconnais mon frère.

A T R É E.

Il fallait le connaître, & ne point l’outrager ;
Ne point forcer ce frère, ingrat, à ſe venger.

T H Y E S T E.

Grands dieux, pour quels forfaits lancez-vous le tonnerre ?
Monſtre, que les enfers ont vomi ſur la terre,
Aſſouvis la fureur dont ton cœur eſt épris ;
Joins un malheureux père à ſon malheureux fils ;
À ſes mânes ſanglants donne cette victime,
Et ne t’arrête point au milieu de ton crime.
Barbare, peux-tu bien m’épargner en des lieux
Dont tu viens de chaſſer & le jour & les dieux ?