Ah ! madame, à qui dois-je un bien ſi doux pour moi ?
Amour, fais, s’il ſe peut, qu’il ne ſoit dû qu’à toi !
Électre, s’il eſt vrai que tant d’ardeur vous touche,
Confirmez notre hymen d’un mot de votre bouche ;
Laiſſez-moi, dans ces yeux de mon bonheur jaloux,
Lire au moins un aveu qui me fait votre époux.
Quoi ! Vous les détournez ! Dieux ! Quel affreux ſilence !
Ma princeſſe, parlez : vous fait-on violence ?
De tout ce que je vois que je me ſens troubler !
Ah ! Ne me cachez point vos pleurs prêts à couler.
Confiez à ma foi le ſecret de vos larmes ;
N’en craignez rien : ce cœur, quoiqu’épris de vos charmes,
N’abuſera jamais d’un pouvoir odieux.
Madame, par pitié, tournez vers moi les yeux.
C’en eſt trop : je pénètre un myſtère funeſte ;
Vous cédez au deſtin qui vous enlève Oreſte ;
Vous croyez déſormais que pour vous aujourd’hui
L’univers tout entier doit périr avec lui.
Votre cœur cependant, à ſa haine fidèle,
Accablé des rigueurs d’une mère cruelle,
Au moment que je crois qu’il s’attendrit pour moi,
M’ahhorre, & ne ſe rend qu’aux menaces du roi.
Fils d’Égiſthe, reviens d’un ſoupçon qui me bieſſe :
Électre ne connaît ni crainte ni faibleſſe ;