Eh quoi ! Tant de malheurs n’ont point laſſé les dieux !
Depuis ſix mois entiers, une fureur commune
Agite tour à tour Jupiter & Neptune.
La foudre eſt l’aſtre ſeul qui nous luit dans les airs :
Neptune va bientôt nous couvrir de ſes mers.
C’en eſt fait ! Tout périt ; la Crète déſolée
Semble rentrer au ſein de la terre ébranlée.
Chaque jour, entouré des plus triſtes objets,
La mort juſqu’en mes bras moiſſonne mes ſujets.
Jupiter, ſur moi ſeul épuiſe ta vengeance !
N’afflige plus des lieux ſi chers à ton enfance !
Mes peuples malheureux n’eſpèrent plus qu’en toi :
Si j’ai pu t’offenſer, ne tonne que ſur moi.
Pour les ſeuls innocents allumes-tu la foudre ?
Sur ſon trône embraſé réduis le prince en poudre,
Épargne les ſujets : pourquoi les frapper tous ?
Qui d’eux, ou de leur roi, mérite ton courroux ?
Quoi ! Toujours de nos maux vous croirez-vous coupable ?
N’armez point contre vous une main redoutable.
Le ciel, depuis longtemps déclaré contre nous,
Semble, dans ſa fureur, ne ménager que vous.
Dans les maux redoublés dont la rigueur nous preſſe,
Votre ſeule pitié, ſeigneur, nous intéreſſe.