Malgré tous vos mépris, que je chéris encore ;
Cet amour qui, malgré votre injuſte rigueur,
N’a jamais plus régné dans le fond de mon cœur ;
Cet amour qui faiſait le bonheur de ma vie,
Il faut à mon devoir que je le ſacrifie.
Non que mon triſte cœur, par ce cruel effort,
Renonce à vous aimer ; mais je cours à la mort :
Heureux ſi mon trépas, devenu légitime,
Des pleurs que j’ai cauſés peut effacer le crime !
Mais ſi c’en était un d’adorer vos beaux yeux,
Je ne ſuis pas le ſeul criminel en ces lieux.
Ce qu’en vain Mérion attendait de ſes armes,
Vous ſeul en un moment l’avez pu par vos charmes :
Tout vous livre à l’envi cet empire fatal.
Régnez, vous le pouvez… mon père eſt mon rival.
Je connais les tranſports & de l’un & de l’autre,
Et je ſais juſqu’où va ſon audace & la vôtre :
Son téméraire amour n’a que trop éclaté.
Sans vous en offenſer vous l’avez écouté !
Je ne m’étonne plus du malheur qui m’accable,
Ni que vos yeux cruels me trouvent ſi coupable.
Votre cœur, à ſon tour épris pour un héros,
N’a pas toujours haï tout le ſang de Minos.