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Page:Œuvres de Philippe Desportes (éd. 1858).djvu/317

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« Le printans les roses produit,
« L’esté plus chaud meurist le fruit,
« Des saisons, divers est l’empire :
« Aux amours la jeunesse duit,
« L’autre âge autre chose desire. »

Connaissant donc ce que je doy,
Faut-il pas suivre une autre loy,
Propre à mon age et ma tristesse ?
Doy-je pas bannir loin de moy
Tous noms d’amour et de maistresse ?

Loin, bien loin, plaisir decevant ;
Arriere espoir conceu de vant,
Qui servois d’attiser ma flamme :
La raison, serve auparavant,
Soit maintenant royne en mon ame.

Las ! durant que je parle ainsi,
Et fains que mon cœur endurcy
Soit fort pour d’amour se defendre,
Ce dieu sans yeux et sans mercy
Fait jaillir des feux de ma cendre.

Un doux importun souvenir,
Devant moy faisant revenir
L’image en mon ame adorée,
Garde que je ne puis tenir
Contre amour de place asseurée.

Seul sujet de mon déconfort,
Pourquoy me presses-tu si fort,
Repassant en ma souvenance
La belle cause de ma mort,
Et l’œil dont je pleure l’absance ?

Mon cœur s’ouvrit par le milieu,
Alors qu’au partir de ce lieu
Tant de pleurs baignoient son visage ;
Sans mourir je luy dis : Adieu !
Suis-je pas de lâche courage ?

Fasse le ciel ce qu’il voudra,
Ce jour au cœur me reviendra :
Et, bien qu’il me tienne loin d’elle,
Mon feu jamais ne s’esteindra ;
J’en trouve la cause trop belle.


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