C’est par la même raison que je ne suis pas plus partisan de l’institution du tribunat ; l’histoire ne m’a pas appris à la respecter. Je ne confie point la défense d’une si grande cause à des hommes faibles ou corruptibles : la protection des tribuns suppose l’esclavage du peuple. Je n’aime point que le peuple romain se retire sur le Mont-Sacré pour demander des protecteurs à un sénat despotique et à des patriciens insolents : je veux qu’il reste dans Rome, et qu’il en chasse tous ses tyrans. Je hais autant que les patriciens eux-mêmes, et je méprise beaucoup plus ces tribuns ambitieux, ces vils mandataires du peuple qui vendent aux grands de Rome leurs discours et leur silence, et qui ne l’ont quelquefois défendu que pour marchander sa liberté avec ses oppresseurs.
Il n’y a qu’un seul tribun du peuple que je puisse avouer ; c’est le peuple lui-même : c’est à chaque section de la république française que je renvoie la puissance tribunitienne ; et il est facile de l’organiser d’une manière également éloignée des tempêtes de la démocratie absolue et de la perfide tranquillité du despotisme représentatif.
Mais avant de poser les digues qui doivent défendre la liberté publique contre les débordements de la puissance des magistrats, commençons par la réduire à de justes bornes.
Une première règle pour parvenir à ce but, c’est que la durée de leur pouvoir doit être courte, en appliquant surtout ce principe à ceux dont l’autorité est plus étendue ;
2o Que nul ne puisse exercer en même temps plusieurs magistratures ;
3o Que le pouvoir soit divisé : il vaut mieux multiplier les fonctionnaires publics que de confier à quelques-uns une autorité trop redoutable ;
4o Que la législation et l’exécution soient séparées soigneusement ;
5o Que les diverses branches de l’exécution soient elles-