Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome II.djvu/275

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

roles de Paul, dans l’Épître I aux Corinthiens (chap. VII, vers 40) : Elle est heureuse, si elle demeure en cet état, ainsi que je lui conseille ; et je pense que l’esprit de Dieu est aussi en moi. Ici, par Esprit de Dieu, il entend son propre esprit, comme le prouve la construction du discours ; car c’est comme s’il disait : La veuve qui ne veut pas faire un second mariage, je l’estime heureuse, moi qui ai résolu de vivre dans le célibat et qui me trouve heureux de cette condition. On trouve d’autres passages de ce genre qu’il est superflu de rapporter ici. Mais puisque nous voulons établir que les Épîtres des apôtres ont été dictées par la seule lumière naturelle, il faut voir maintenant comment ils pouvaient enseigner par la seule science naturelle des choses qui ne tombent pas dans sa sphère. Mais, pour peu que nous prenions garde à ce que nous avons dit sur l’interprétation de l’Écriture au chap. VII de ce Traité, il n’y aura ici pour nous aucune difficulté. Car, bien que les choses que renferme la Bible dépassent de beaucoup notre intelligence, nous pouvons toutefois les discuter en toute sécurité, pourvu que nous n’admettions aucun principe qui ne soit tiré de l’Écriture même ; et c’est ainsi qu’en usaient les apôtres pour tirer des conséquences de ce qu’ils avaient vu, entendu, et aussi de ce qu’ils avaient appris par révélation, afin de l’enseigner aux peuples quand ils le jugeaient à propos. Ensuite, quoique la religion telle que la prêchaient les apôtres, à savoir, en faisant un simple récit de la vie du Christ, ne soit pas accessible à la raison, il n’est personne du moins qui par la lumière naturelle n’en puisse facilement saisir le principal (qui consiste principalement en instructions morales, comme la doctrine tout entière du Christ). Enfin les apôtres n’avaient pas besoin d’être éclairés par une lumière surnaturelle pour prêcher une religion qu’ils avaient auparavant confirmée par des signes, et pour la mettre si bien à la portée des intelligences ordinaires que chacun pût facilement l’embrasser ; et c’est le propre but des Épîtres, savoir, d'en-