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Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome II.djvu/314

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pitre VII que le sens doit en être déterminé par sa seule histoire, et non par l’histoire universelle de la nature, qui ne sert de fondement qu’à la Philosophie. Si, après avoir découvert laborieusement le vrai sens de la Bible, nous trouvons çà et là qu’elle répugne à la raison, cette considération ne doit pas nous arrêter ; car tous les passages de ce genre qui se trouvent dans la Bible, ou que les hommes peuvent ignorer sans préjudice pour la charité, nous savons positivement qu’ils ne touchent nullement la théologie ou la parole de Dieu, et conséquemment que chacun peut sans crainte en penser tout ce qu’il veut. Nous concluons donc d’une manière absolue que l’Écriture ne doit pas être subordonnée à la raison, ni la raison à l’Écriture. Mais prenons-y garde, puisque ce principe de la théologie, savoir, que l’obéissance, à elle seule, peut sauver les hommes, est indémontrable, et que la raison ne peut en préciser la vérité ou la fausseté, on est en droit de nous demander pourquoi nous le croyons : si c’est sans raison et comme des aveugles que nous l’embrassons, nous agissons donc aussi avec folie et sans jugement ; que si, au contraire, nous voulons établir que la raison peut démontrer ce principe, la théologie sera donc une partie de la philosophie, et une partie inséparable. Mais à ces difficultés je réponds que je soutiens d’une manière absolue que la lumière naturelle ne peut découvrir ce dogme fondamental de la théologie, ou du moins qu’il n’y a personne qui l’ait démontré, et conséquemment que la révélation était d’une indispensable nécessité, mais cependant que nous pouvons nous servir du jugement pour embrasser au moins avec une certitude morale ce qui a été révélé. Je dis avec une certitude morale ; car nous n’en sommes pas à espérer que nous puissions en être plus certains que les prophètes eux-mêmes, à qui ont été faites les premières révélations, et dont pourtant la certitude n’était que morale, comme nous l’avons déjà prouvé dans le chapitre II de ce Traité. Ils se trompent donc étrangement ceux qui veulent établir