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TRAITÉ

fie encore un grand courage. Ainsi le courage de Gédéon, celui de Samson sont appelés, dans les saintes lettres, esprit de Dieu, c’est-à-dire cœur intrépide et prêt à tout. C’est encore dans ce sens qu’une vertu ou une force extraordinaire, de quelque espèce qu’elle soit, est appelée esprit ou vertu de Dieu, comme dans l’Exode (chap. xxxi, vers. 3) : « Et je le remplirai (Betzaléel) d’un esprit de Dieu, » c’est-à-dire, ainsi que l’Écriture elle même l’explique, d’une intelligence et d’une adresse au-dessus du commun. De même, dans Isaïe (chap. xi, vers. 2) : « Et l’esprit de Dieu reposera sur lui, » c’est-à-dire, suivant l’usage de l’Écriture et les explications que donne Isaïe lui-même un peu plus loin, un esprit de sagesse, de conseil, de force, etc. — De même, la mélancolie de Saül est appelée mauvais esprit de Dieu, c’est-à-dire une mélancolie très-profonde ; car les serviteurs de Saül, qui appelaient sa mélancolie une mélancolie de Dieu, furent justement ceux qui lui conseillèrent de faire venir un musicien qui le pût distraire en jouant de la lyre ; ce qui prouve bien que par mélancolie de Dieu ils entendaient une mélancolie naturelle. — Enfin l’esprit de Dieu signifie l’âme ou l’intelligence de l’homme, comme dans Job (chap. xxxvii, vers. 3) : « Et l’esprit de Dieu était dans mes narines, » faisant allusion à ce qui est écrit dans la Genèse, savoir : que Dieu souffla aux narines de l’homme une âme vivante. Ainsi Ézéchiel, prophétisant aux morts, leur dit (chap. xxxvii, vers. 14) : « Je vous donnerai mon esprit, et vous vivrez, » c’est-à-dire je vous rendrai la vie. C’est dans ce sens qu’il faut entendre Job (chap. xxxiv, vers. 14) : « Quand il voudra (Dieu), il retirera à soi son esprit et son souffle » (c’est-à-dire la vie qu’il nous a donnée) ; et la Genèse (chap. vi, vers. 3) : « Mon esprit ne raisonnera plus (ou ne gouvernera plus) dans l’homme, parce qu’il est chair, » c’est-à-dire l’homme désormais ne se gouvernera plus que par les instincts de la chair, et non par les décisions de la raison que je lui ai donnée pour discerner le bien du mal. De même, dans