Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 1.djvu/146

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La cravate nouée et les cheveux en ordre,
Le frac boutonné jusqu’au cou,
Pas le plus petit pli sur quoi l’on puisse mordre,
Rien de débraillé, rien de fou,
Rien de hardi, de chaud, de bon viveur, qui fasse
Au reproche mollir la voix
Et dire au père : « Il faut que jeunesse se passe, »
Comme l’on disait autrefois.
J’aime trente fois mieux une débauche franche,
Jetant son masque de satin,
Le coude sur la nappe et la main sur la hanche.
Criant, buvant jusqu’au matin,
Qui laisse, sans corset, aller sa gorge folle,
Rose encor des baisers du soir,
Qui tord lascivement sa taille souple et molle,
Sur tous les genoux va s’asseoir,
Et, bleuissant sa joue au punch qui siffle et flambe
Au fond du cratère vermeil,
Rit de se voir ainsi, danse et montre sa jambe,
Et ne veut pas qu’on ait sommeil :
— C’est une poésie au moins, une palette
Où brillent mille tons divers,
Un type net et franc, une chose complète,
De la couleur ! des chants ! des vers !