Car je sais maintenant que vaut cette fumée
Qu’au-dessus du néant pousse une renommée.
J’ai regardé de près et la science et l’art :
J’ai vu que ce n’était que mensonge et hasard ;
J’ai mis sur un plateau de toile d’araignée
L’amour qu’en mon chemin j’ai reçue et donnée :
Puis sur l’autre plateau deux grains du vermillon
Impalpable, qui teint l’aile du papillon,
Et j’ai trouvé l’amour léger dans la balance.
Donc, reçois dans tes bras, ô douce somnolence,
Vierge aux pâles couleurs, blanche sœur de la mort,
Un pauvre naufragé des tempêtes du sort !
Exauce un malheureux qui te prie et t’implore,
Egraine sur son front le pavot inodore,
Abrite-le d’un pan de ton grand manteau noir,
Et du doigt clos ses yeux qui ne veulent plus voir.
Vous, esprits du désert, cependant qu’il sommeille,
Faites taire les vents et bouchez son oreille,
Pour qu’il n’entende pas le retentissement
Du siècle qui s’écroule, et ce bourdonnement
Qu’en s’en allant au but où son destin la mène
Sur le chemin du temps fait la famille humaine !
Je suis las de la vie et ne veux pas mourir ;
Mes pieds ne peuvent plus ni marcher ni courir ;
J’ai les talons usés de battre cette route
Qui ramène toujours de la science au doute.
Assez, je me suis dit, voilà la question.
Va, pauvre rêveur, cherche une solution
Claire et satisfaisante à ton sombre problème,
Tandis qu’Ophélia te dit tout haut : Je t’aime ;
Mon beau prince danois marche les bras croisés,
Le front dans la poitrine et les sourcils froncés,
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