vanité et la faiblesse; c'est celui qui méprise la gloire, -pour
vivre avec honneur dans l‘infamie '.
A la mort, dit-on , que sert la gloire? Je réponds : Que
sert la fortune? que vaut la beauté? Les plaisirs et la vertu
méme ne unissent-ils pas avec la vie ? La mort nous ravit
nos honneurs, nos trésors, nos joies, nos délices, et rien ne
nous suit au tombeau. Mais de la qu’osons«nous conclure?
sur quoi fondons-nous nos discours? Le temps ou nous ne
serons plus esteil notre objet ‘? Qu'importe au bonheur de la
vie ce que nous pensons à la mort? Que peuvent, pour
adoucir la mort, la mollesse, Yintempérance, ou l'obsourité `
de la vie?
Nous nous persuadons faussement qu’on ne peut dans le
même temps agir et jouir, travailler pour la gloire toujours
incertaine, et posséder le présent dans ce travail. Je de- ·
mande : Qui doit jouir? l’indolent ou le laborieux? le faible
ou le fort? Et l'oisiveté, jouit-elle?
L’action fait sentir le présent’ ; l’amour de la gloire rap-
proche et dispose mieux l’avenir; il nous rend agréable le
travail que notre condition rend nécessaire. Apres avoir
comme enfanté le mérite dc nos beaux jours, il couvre d’un
voile honorable les pertes de l’â.ge avancé : l'homme se
survit; et la gloire, qui ne vient qu‘après la vertu, subsiste
ëlprès elle.
Hésiterions-nous, mon ami? et nous serait-il plus utile
d'ètre méprisés qu’estimés, paresseux qu’actifs, vains et
amollis qu'ambitieux? Si la gloire peut nous tromper, le
Haérite ne peut le fairei; et s'il·n’aide à notre fortune, il
1 On peut vivre avec un certain éclat dans Pinfsmie; mais peut-on y vivre
Avec honneur? — S.
• Ici, comme presque partout, Vauvenargues ne considère dans I'homme
Que sa destinée nctueIIe,et l'ob]et qu'iI lui propose, c'est Pimmortalité mr
la terre ; quant A notre dœtinéc future, il ne la nie pus, mais il la néglige.
— G.
¤ Voir plus haut Ia 35* Reflexion :L'nclivilé est dom Perdre de la nature.
—G.
• Bspprochez des 2à*. 27*, 28¤ et 20• Réflexions, où Vauvenargues parait
singulièremcnt désabusé A cet égard. — G.
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Page:Œuvres de Vauvenargues (1857).djvu/183
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DISCOURS SUR LA GLOIRE.