d’en sortir par leurs idées ; et, si l’on en voit quelques-uns que la spéculation des grandes choses rend en quelque sorte incapables des petites, on en trouve encore davantage à qui la pratique des petites a ôté jusqu’au sentiment des grandes.
231. Les espérances les plus ridicules et les plus hardies ont été quelquefois la cause des succès extraordinaires.
232. Les sujets font leur cour avec bien plus de goût que les princes ne la reçoivent : il est toujours plus sensible d’acquérir que de jouir.
233. Nous croyons négliger la gloire par pure paresse, tandis que nous prenons des peines infinies pour les plus petits intérêts[1].
234. Nous aimons quelquefois jusqu’aux louanges que nous ne croyons pas sincères[2].
235. Il faut de grandes ressources dans l’esprit et dans le cœur pour goûter la sincérité lorsqu’elle blesse, ou pour la pratiquer sans qu’elle offense : peu de gens ont assez de fond pour souffrir la vérité, et pour la dire.
236. Il y a des hommes qui, sans y penser[3], se forment une idée de leur figure, qu’ils empruntent du sentiment qui les domine ; et c’est peut-être par cette raison qu’un fat se croit toujours beau[4].
237. Ceux qui n’ont que de l’esprit ont du goût pour les grandes choses, et de la passion pour les petites.
238. La plupart des hommes vieillissent dans un petit
- ↑ [Bien. — V.]
- ↑ Var. : « Les hommes sont si sensibles à la flatterie, que, lors même qu’ils « pensent que c’est flatterie, ils ne laissent pas d’en être les dupes. »
- ↑ Comment se forme-t-on une idée de soi, sans y penser ? J’aimerais mieux sans s’en apercevoir. — M.
- ↑ Var. : « Nous nous formons, sans y penser, une idée de notre figure sur l’idée que nous avons de notre esprit, ou sur le sentiment qui nous domine ; et c’est pour cela qu’un fat se croit toujours si bien fait. »