Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/73

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de pays, le Parthe exilé boira les eaux de l’Arar, et le Germain celles du Tigre, avant que son image s’efface de mon cœur.

MÉLIBÉE.

Mais nous, exilés de ces lieux, nous irons les uns chez l’Africain brûlé par le soleil, les autres dans la Scythie, ou en Crète, sur les bords de l’Oaxe rapide, ou chez les Bretons séparés du reste de l’univers. Oh ! jamais, après un long exil, après plusieurs moissons, ne reverrai-je le sol de ma patrie et le toit rustique de ma pauvre chaumière, jamais ce petit champ qui formait mon royaume ? Un soldat impie possédera ces terres cultivées avec tant de soin ? un Barbare, ces moissons ? Voilà où la discorde a conduit nos malheureux citoyens ! voilà pour qui nous avons ensemencé nos champs ! Va maintenant, Mélibée, greffer tes poiriers, aligner tes ceps ! Et vous, troupeau jadis heureux, allez, mes chèvres, allez ! étendu dans une grotte verdoyante, je ne vous verrai plus de loin suspendues aux flancs d’une roche buissonneuse. Désormais plus de chants. Non, vous n’irez plus, sous ma conduite, brouter le saule amer et le cytise fleuri.

TITYRE.

Cependant cette nuit, tu peux encore la passer avec moi sur un lit de feuillage. Nous avons des fruits mûrs, des châtaignes