Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/157

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tait à son récit, « au moment où je m’ennuyais le plus de ne point voir la fin de la prédication, on vint dire que les dragons arrivaient. Les uns couraient, les autres criaient : Debout ! les autres : À bas les Philistins ! Je pressais ma mère de s’en aller avant que les habits rouges arrivassent ; mais il m’eût été aussi difficile de faire marcher notre vieux bœuf de devant sans l’aiguillon. Du diable si elle voulut bouger d’un pas. Eh bien, après tout, le vallon où nous nous trouvions était étroit, le brouillard devenait épais, et sans doute nous aurions échappé aux dragons si nous eussions su retenir notre langue ; mais, comme si le vieux Kettledrummle lui-même n’avait pas fait assez de sabbat pour réveiller les morts, ils se mirent à brailler un psaume que vous auriez entendu de Lanrik ! Enfin, pour abréger une longue histoire, arrive mon jeune lord Evandale, sautant aussi vite que son cheval pouvait trotter, et vingt habits rouges derrière lui. Deux ou trois hommes voulurent se battre absolument, le pistolet d’une main et la bible de l’autre, et ils furent massacrés ; cependant il n’y a pas eu beaucoup de sang répandu, car Evandale criait toujours qu’on nous dispersât, mais qu’on nous laissât la vie. — Et n’avez-vous fait aucune résistance ? » dit Morton, qui sentait probablement qu’à ce moment il lui aurait fallu beaucoup moins de raisons pour lui faire attaquer Evandale. — Non vraiment, reprit Cuddie : je restai toujours devant la vieille femme, et je criais miséricorde pour elle et pour moi ; mais deux des habits rouges arrivèrent, et l’un d’eux allait frapper ma mère avec le plat de son sabre… alors je levai mon bâton sur eux, et je leur dis que je leur en rendrais autant. Eh bien, ils se retournèrent sur moi pour me frapper de leurs sabres, mais je défendis ma tête avec ma main aussi bien qu’il me fut possible, jusqu’à ce que lord Evandale arrivât, et alors je lui criai que j’étais un serviteur de Tillietudlem… vous savez vous-même qu’on a toujours cru qu’il courtisait notre jeune lady… et il me dit de jeter mon bâton, et ainsi ma mère et moi nous nous rendîmes prisonniers. Je pense qu’on nous aurait laissés nous échapper, si Kettledrummle n’avait pas été pris avec nous… Il était monté sur le cheval d’Andrews Wilson, qui avait appartenu long-temps à un dragon ; plus Kettledrummle le pressait pour fuir, plus l’animal entêté se mit à courir vers les dragons dès qu’il les aperçut. Eh bien, quand ma mère et lui se réunirent, ils se mirent à apostropher les soldats à leur manière : « Bâtards de la fille de Babylone ! » étaient les plus douces paroles