Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/38

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Les spectateurs, hommes et femmes, tournèrent dans la même direction la tête de leurs chevaux, et tous attendaient avec anxiété l’issue de cette lutte d’adresse.

Il était d’usage que dans le second combat le hasard décidât de l’ordre dans lequel les compétiteurs viseraient le but. Le sort tomba sur le jeune plébéien dont la figure agreste était à moitié cachée par son manteau ; il saisit son mousquet, et s’adressant au jeune homme à l’habit vert : « Si c’était un tout autre jour, monsieur Henri, j’aurais pu, pour l’amour de vous, me résigner à manquer le but ; mais Jenny Dennison me regarde, et je ferai, certes, de mon mieux. »

Il visa, et sa balle en sifflant rasa le but de si près, que l’oiseau, sans être atteint, fut ébranlé. Le plébéien, quittant la lice les yeux baissés, se hâta de disparaître, comme s’il eût craint d’être reconnu. C’était le tour du chasseur vert ; sa balle de nouveau frappa le perroquet. Tout le monde applaudit, et du milieu de l’assemblée un cri se fit entendre : « Que la bonne et vieille cause triomphe à jamais ! »

À ces exclamations de la part des mécontents les dignitaires froncèrent le sourcil. Cependant le jeune lord Evandale s’avança de nouveau, et fut encore heureux. Son succès fut accueilli par les applaudissements et les félicitations de la partie aristocratique et bien pensante de l’assemblée. Mais il fallait recourir encore à une troisième épreuve.

Le chasseur vert, déterminé à mettre fin à ce combat, s’approcha de son cheval que gardait un des siens, et en ayant préalablement assuré avec soin les sangles et la selle, il s’élança dessus, le gouvernant de manière à éloigner un peu les assistants ; alors il donna de l’éperon, galopa vers l’endroit d’où il devait tirer, et sans arrêter la course de son cheval, en abandonnant les rênes et se plaçant de côté sur la selle, il visa le but et abattit le perroquet. Lord Evandale imita son exemple, quoique plusieurs de ceux qui l’entouraient prétendissent que ce qui venait de se passer était une innovation aux règles établies, qu’il n’était point obligé de suivre. Mais, ou l’adresse du jeune lord n’était pas aussi parfaite, ou son cheval n’était pas aussi bien dressé ; l’animal broncha au moment où son maître visait, et la balle n’atteignit pas l’oiseau. Ceux qui avaient été surpris de l’adresse du chasseur vert admirèrent également la courtoisie dont il fit preuve alors. Il rejeta tout le mérite de la dernière épreuve, proposa à