Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/37

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couverte de plumes qui ornait sa tête, tout annonçait en lui un homme au-dessus du commun. Dès qu’il parut dans la lice, un murmure de curiosité s’éleva parmi les spectateurs ; il nous serait difficile de dire si ce murmure était ou non favorable à notre jeune aventurier.

« Faut-il que le fils d’un tel père prenne part à de semblables folies ! » s’écriaient les vieux et rigides puritains chez lesquels la curiosité avait été assez puissante pour surmonter leurs scrupules et les amener à l’assemblée. Mais la plupart de leurs coreligionnaires envisageaient cet incident avec moins de sévérité ; tous se bornaient à faire des vœux pour le succès du fils d’un de leurs anciens chefs alors décédé, sans examiner sévèrement s’il était convenable que le jeune homme se présentât pour disputer le prix.

Leurs vœux furent accomplis : du premier coup le jeune aventurier frappa le perroquet ; il était le seul qui jusqu’alors, nous le répétons, eût atteint le but, quoique quelques balles en eussent passé fort près. De bruyants applaudissements se firent entendre : mais le succès n’était pas décisif ; il fallait que les compétiteurs qui venaient après lui eussent la même chance, et que, si quelques-uns d’entre eux frappaient le but, il combattît de nouveau avec les vainqueurs, le prix ne devant être accordé qu’à celui qui ferait preuve d’une évidente supériorité sur ses rivaux. Parmi ceux qui suivirent, deux seulement parvinrent à frapper l’oiseau : le premier était un jeune homme d’un rang inférieur et d’une constitution robuste ; un manteau gris enveloppait sa figure et la dérobait aux regards ; le second était un jeune seigneur, remarquable par ses dehors séduisants et les soins qu’il avait apportés à sa toilette. Il suivait avec assiduité, depuis le commencement de la revue, lady Marguerite et miss Bellenden. Cette dame s’étant informée pourquoi aucun jeune homme de famille et de principes purs ne se présentait pour disputer le prix aux deux compétiteurs victorieux, lord Evandale (c’était le nom de ce seigneur) quitta ces dames avec un air d’indifférence ; mais bientôt, se précipitant de son cheval et empruntant le fusil d’un serviteur, il atteignit le but, comme on vient de le voir. On se figure aisément le vif intérêt excité par le renouvellement du combat entre les trois rivaux qui jusqu’alors avaient été heureux. Le massif équipage du duc fut, non sans peine, mis en mouvement, et il s’approcha de plus près du lieu où se passait l’action.