Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/85

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« Maintenant nous sommes encore une fois en place, dit Cuddie à sa mère, et si nous ne sommes pas si bien que là-bas, cependant la vie est toujours la vie ; j’espère que vous n’aurez plus de discussion avec personne, d’autant plus que nous voici avec des gens de notre communion. — De notre communion, mon fils ! » dit Mause trop éclairée ; « malheur à moi pour ton aveuglement et le leur ! Oh, Cuddie ! ils ne sont que dans la cour des gentils, et ne gagneront pas plus de terrain, je l’appréhende ; ils ne sont qu’un peu meilleurs que les prélatistes. Leur ministre est cet aveugle mondain Peter Poundtext, autrefois prédicateur distingué de l’Évangile, et à cette heure, ministre apostat, qui, pour le vil amour d’un salaire et de son propre entretien, a quitté la seule voie véritable, et s’est perdu en courant après la noire tolérance. Ô mon fils ! si vous aviez profité des doctrines évangéliques que vous avez entendues dans le vallon de Bengonnar, de la bouche même de Richard Rumbleberry, ce brave jeune homme qui souffrit le martyre pour sa croyance à Grass-Market[1], avant la Chandeleur ! Ne lui avez-vous pas entendu dire que l’érastianisme était aussi mauvais que le prélatisme, et la tolérance aussi mauvaise que l’érastianisme[2]… ? — A-t-on jamais rien ouï de pareil ? » s’écria Cuddie interrompant sa mère ; « nous serons chassés de cette maison, et nous aurons encore à chercher du service ailleurs ! Eh bien ! ma mère, je n’ai plus qu’un mot à vous dire : si j’entends encore une seule parole de vous sur ce sujet, du moins devant du monde, car pour moi cela m’est indifférent ; si vous parlez encore ainsi en public sur Poundtext et Rumbleberry, sur leurs doctrines et leurs méchantes prédications, je me ferai soldat, et je deviendrai sergent ou capitaine, en vous laissant aller au diable avec tous ces énergumènes. Je n’ai jamais rien retenu de bon de leur doctrine, comme vous l’appelez, si ce n’est une vilaine attaque de colique en me tenant assis pour écouter le sermon au milieu d’une plaine marécageuse et humide, pendant plus de quatre heures ; et milady m’a guéri avec une potion purgative. Mais si, pour le dire en passant, elle avait su où j’avais gagné ce mal, elle se serait bien gardée de me guérir. »

Bien que Mause gémît intérieurement sur l’endurcissement et l’impénitence de son fils, elle n’osa ni le presser davantage sur un tel sujet, ni négliger l’avertissement qu’il lui avait donné ; elle re-

  1. Place des exécutions à Édimbourg. a. m.
  2. Ce mot qui vient du grec ἐραστὴς, qui veut dire aimant. a. m.