mais voulu y croire. — J’en remercie mon honorable ami, et (serrant la main du lord garde des sceaux) encore plus mon honorable ennemi. — Inimicus amicissimus[1], dit le garde des sceaux. Mais j’ai entendu ce drôle prononcer le nom de M. Hayston de Bucklaw. J’ai bien peur que le pauvre jeune homme ne soit sous un mauvais guide. — Il est assez âgé pour savoir se conduire, reprit le Maître. — Assez âgé, je ne dis pas non ; mais à peine assez sage, s’il l’a pris pour son fidus Achates[2]. Comment ! il a porté une accusation contre lui ; c’est-à-dire qu’on aurait pu interpréter ses paroles comme telles, si nous n’avions pas fait plutôt attention au caractère du témoin qu’à la teneur de sa déposition. — Je crois, dit le Maître, que M. Hayston de Bucklaw est un homme d’honneur et incapable d’une action avilissante ou honteuse. — Dans tous les cas, il faut admettre qu’il est capable d’actions bien déraisonnables, Maître. La mort le mettra bientôt en possession d’une belle propriété, s’il ne l’a déjà. La vieille lady Girnington est une excellente femme ; seulement elle a un si mauvais caractère qu’elle est insupportable à tout le monde ; elle a peut-être cessé de vivre à présent. Six héritiers sont morts successivement pour la rendre plus riche. Je connais fort bien ses propriétés. Elles sont voisines des miennes, elles sont magnifiques. — J’en suis fort aise, dit Ravenswood, et je le serais encore davantage si je pouvais être sûr que Bucklaw changeât de compagnie en changeant de fortune. Cette apparition de Craigengelt en qualité d’ami est un triste présage pour son avenir. — C’est un oiseau de mauvais augure, reprit le garde des sceaux. Il n’annonce que prison, c’est un gibier de potence. Mais je m’aperçois que M. Caleb est impatient de nous voir déjeuner. »
CHAPITRE XVIII.
le départ.
Le Maître de Ravenswood trouva un prétexte pour quitter ses