Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/257

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bonne nuit à son noble parent, il était au moment de monter la colline pour se rendre au château, dont l’incendie, parvenu à son plus haut point, élevait une immense colonne de feu, qui répandait au loin son éclat du côté de la mer et en colorait les vagues.

« Prenez un cheval, Ravenswood, » s’écria le marquis extrêmement affecté de ce nouveau malheur qui venait si inopinément fondre sur son jeune protégé ; « je vais en monter un autre ; et vous » ajouta-t-il en s’adressant à ses gens, « prenez le galop, afin de voir promptement ce que l’on peut faire pour sauver les meubles ou pour éteindre le feu. Courez comme s’il y allait de votre vie. »

Tous les domestiques se mirent en devoir d’exécuter cet ordre après avoir demandé à Caleb de leur montrer le chemin. Quelques-uns étaient déjà partis de toute la vitesse de leurs chevaux, quand la voix du prudent sénéchal se fit entendre au-dessus du tumulte. « Oh ! arrêtez…, arrêtez, messieurs ; tournez bride, pour l’amour de Dieu ! N’ajoutez pas la perte de votre vie à celle de tant d’objets précieux ! Trente barils de poudre, débarqués d’un lougre venant de Dunkerque, du temps du vieux lord, sont dans les caves de la tour. Le feu ne saurait en être bien éloigné, j’en suis sûr. Pour l’amour de Dieu, tournez à droite. Mettons la colline entre nous et le danger. Vous seriez écrasés par la chute de la plus légère des pierres de Wolf’s-Crag. »

On croira facilement qu’une pareille annonce fit prendre précipitamment au marquis et à ses gens la route que Caleb leur prescrivait, entraînant Ravenswood avec eux, bien qu’il y eût dans cette histoire beaucoup de choses qu’il lui était impossible de comprendre. « De la poudre ! » s’écria-t-il en saisissant Caleb qui s’efforçait en vain de lui échapper ; « quelle poudre ? Comment une quantité quelconque de poudre pouvait-elle se trouver à Wolf’s-Crag sans que j’en susse rien ? c’est ce que je ne puis concevoir. — Mais je peux le concevoir, moi, » interrompit le marquis en lui parlant à l’oreille ; « je le conçois parfaitement ; pour Dieu ! ne lui faites pas de questions en ce moment… Il y a trop d’oreilles autour de nous, » ajouta-t-il à voix basse.

« J’espère, » dit Caleb en se débarrassant des mains de son maître et en rajustant ses vêtements, « j’espère que Votre Honneur en croira l’honorable témoignage de Sa Seigneurie. Sa Seigneurie se rappelle fort bien que l’année où celui qu’on appelait le roi Guillaume mourut… — Chut ! chut ! mon bon ami, dit le marquis ; je satisferai la curiosité de votre maître à cet égard. — Et